Il n’est pas facile de s’y retrouver dans les différents formats d’images (FIT, FTS, RAW, TIF, TIFF, BMP, JPEG …). Comme il est fréquent de passer d’un format d’image à un autre en astrophotographie, il est important de savoir ce qui se passe lorsqu’on change de format en cours de traitement d’images pour éviter de perdre une partie de l’information qui a demandé beaucoup d’efforts à acquérir lors de la session d’imagerie astronomique.
La conception d’une image numérique
En imagerie numérique, l’information est codée à l’aide de 0 et de 1. C’est donc un codage binaire. Ces informations élémentaires de deux possibilités s’appellent le bit. Appliqué à une image numérique, chaque pixel de la caméra peut détailler une des valeurs suivantes :
- Un bit : Il n’y a que deux possibilités : Noir ou blanc.
- 2 bits : 4 nuances ou teintes différentes possibles (2 x 2).
- 4 bits : 16 nuances possibles (2 x 2 x 2 x 2) ou 2 à la puissance 4.
- 8 bits : 256 nuances possibles (2 à la puissance 8).
- 10 bits : 1024 nuances possibles (2 à la puissance 10).
- 12 bits : 4096 nuances (2 à la puissance 12).
- 14 bits : 16384 nuances (2 à la puissance 14).
- 16 bits : 65536 nuances (2 à la puissance 16).
- 24 bits : 16,8 millions de nuances (2 à la puissance 24).
- 32 bits : 4295 millions de nuances (2 à la puissance 32).
- Et ainsi de suite.
Cette explication de base nous servira à comprendre tous les différents formats d’images. On saisira aussi que plus un pixel contient de bits, plus l’image sera volumineuse et occupera un plus grand espace sur le disque dur de l’ordinateur. Aussi plus l’image est volumineuse, plus le traitement de cette image demandera de la puissance au processeur de l’ordinateur.
Le format d’image de base BMP
Le format d’images BMP (avec extension .bmp) est considéré de base pour produire une photo. L’image est en 8 bits (256 nuances différentes possibles). On l’utilise surtout pour produire des images en couleurs avec une caméra couleur numérique. On ajoute sur chaque pixel un filtre de couleur Rouge, Vert ou Bleu pour produire l’image couleur (4 pixels sont utilisés, 1 rouge, 2 verts et 1 bleu). L’image résultante a 3 couches de couleurs R V et B. Chaque couche a 8 bits. L’image couleur vaut donc 24 bits (3 images de 8 bits chacune = 24 bits totaux). On peut donc produite 16,8 millions de teintes de couleurs différentes avec ce format. Il est à noter que ce format d’image n’est plus beaucoup utilisé de nos jours dans les APN. Aussi, il y a des personnes qui désignent ce format 8 bits et d’autres 24 bits. Il faut comprendre que lorsqu’on désigne ce format en 8 bits, on veut dire qu’il peut produire 256 nuances différentes. Lorsqu’on le désigne 24 bits, on indique qu’une image couleur au format BMP peut produire 16,8 millions de teintes de couleurs différentes. Qu’on le désigne 8 bits ou 24 bits, ce format ne change donc pas, il reste le même. Cette observation est aussi valable pour tous les formats d’images. Il est important de comprendre cette nuance dans la désignation des formats d’images. Moi-même, j’ai été confus dans la désignation 8 bits et 24 bits. Je croyais qu’il existait des formats d’images BMP en 8 bits et d’autres en 24 bits jusqu’à je comprenne qu’on décrivait le même format (8 bits = 256 nuances différentes par couche de couleur et 24 bits = 16,8 millions de teintes totales de couleurs différentes pour les 3 couches).
Le format d’image en astronomie FITS
Le format d’images FITS ou Flexible Image Transport System est le format d’image le plus utilisé en astronomie. Il est conçu spécifiquement pour des données scientifiques. Il peut porter les extensions de fichier FIT ou FTS entre autres. Une caractéristique importante de ce format est qu’il dispose d’un en-tête de données textes, au format ASCII, pour inscrire les données sur la prise de vue. Il est disponible en 16 bits et 32 bits, mais le plus utilisé en imagerie CCD est le 16 bits. L’image produite est monochrome. On peut par contre produire une image couleur en prenant des images individuelles avec un filtre Rouge, Vert et Bleu. Pour plus de détails, voir la technique LRVB de ce site. Aussi, avec une caméra CCD couleur, on peut utiliser ce format en mode RAW (voir ci-dessous) pour produire une image couleur.
Bien que ce format d’images est en 16 bits, il est prévu pour contenir des valeurs négatives qui sont utilisées dans les domaines scientifiques d’imagerie tels que le rayon X, l’infrarouge et la photométrie. Il peut donc contenir des données d’imagerie de -32767 à +32767. C’est le format le plus répandu. On le nomme format signé. Il est a noté que certains fabricants, comme Starlight, utilisent le format 16 bits positif (0 à 65535 = 65536), appelé format non signé, mais il est moins utilisé. La plupart des logiciels de prétraitement peuvent lire ces 2 types de formats. Par contre, certains programmes d’imagerie ne réussissent pas à lire correctement le format signé. La raison principale est qu’ils ne décalent pas les valeurs négatives pour aller de 0 à 65535. Par exemple, le logiciel Fit Liberator fait très bien ce travail de décalage et conserve donc dans son intégrité les données 16 bits du format signé. De plus, il rend parfaitement compatibles les deux formats.
L’image produite dans ce format n’est pas compressée. Il est à noter qu’on peut sauvegarder l’image en un format FITS compressé. En imagerie astronomique, ne jamais utilisé cette fonction pour archiver vos images, car elles seront dégradées.
Lorsqu’on regarde les images à l’écran, elles sont très sombres. Ce sont des images brutes sans traitement logiciel pour les faire apparaitre visuellement belles. Aucun ajout cosmétique n’est ajouté. Par le fait même, elles sont d’une grande pureté. Si on regarde l’histogramme de ces images, on constatera que toute l’information sur l’image est là. Le prétraitement et le traitement de ces images permettront d’en ressortir visuellement tous les détails et toutes les nuances.
Le mode RAW
On utilise le mode RAW pour les appareils photo numériques (APN) et les CCD couleur qui prennent les images en couleur en une seule exposition. Si on regarde une image directement dans ce mode, elle est monochrome. Mais l’image conserve les couleurs. Ce sont des images brutes qui proviennent directement du capteur CCD ou CMOS. Elles ne sont pas « bricolées » par le logiciel interne de l’appareil pour les rendre plus présentables visuellement. De plus, elles sont d’une grande utilité en imagerie astronomique, car on peut réaliser le prétraitement de ces images en monochrome qui est le format idéal pour effectuer cette tâche. Après ce prétraitement, on peut convertir l’image en couleur. Ce mode n’est pas compressé, de sorte qu’il garde intacte toute l’information sur l’image.
Pour les appareils CCD couleurs, le format d’image pour ce mode RAW est FITS 16 bits (par couleur) la plupart du temps. Il a donc toutes les particularités de ce format (incluant l’en-tête de données textes). Pour les APN, c’est plutôt la jungle car il n’y a pas de standards. Ils sont de 10 à 14 bits par couleur (RVB). Comme le mode RAW n’est pas directement exploitable en couleur, il faut utiliser un logiciel pour en extraire les trois plans de couleur fondamentaux (rouge, vert et bleu) et encore là il n’y a pas de standards. Donc, pour en extraire les couleurs, il faut utiliser la bonne matrice Bayer et ce n’est pas facile de s’y retrouver, car les fabricants ne donnent pas toujours l’information sur leur propre matrice. C’est encore la jungle sur les extensions de fichiers. Chez Canon, ces fichiers ont l’extension CRW, chez Nikon, l’extension est NEF, Olympus .ORF et chez Fuji .RAF.
Le mode RAW se retrouve dans les modèles hauts et de milieu de gamme de ces fabricants. Donc, si vous utilisez ce mode pour produire vos images astronomiques en couleur (en une seule opération), assurez-vous d’avoir le logiciel qui permettra d’extraire les 3 plans de couleurs en utilisant la bonne matrice Bayer.
Le format d’image TIFF pour le traitement des images avec Photoshop
Le logiciel Photoshop ne peut pas lire directement les images au format FITS. Pour cette raison, on doit convertir ces images au format TIFF (avec extension .tif ou tiff). Ce format est de 16 ou 32 bits et même 64 bits. Pour la conversion, on utilise le format TIFF 16 bits, car l’image d’origine est du même format (FITS 16 bits). Pour ne pas perdre une partie de l’information contenue dans les deux fichiers FITS signé et non signé, on doit utiliser un logiciel qui amplifiera le signal sans perte de données avant la conversion au format TIFF. En effet, il faut se souvenir que les images au format FITS sont des images brutes sans traitements logiciels pour augmenter le signal faible de ces images sombres (voir explication ci-dessus). Les logiciels conçus spécifiquement pour faire ce travail de conversion sans perte de données seront abordés dans les sections portant sur le prétraitement et le traitement des images astronomiques.
Comme pour le format FITS, ne jamais archiver vos images en TIFF compressé car elles seront dégradées.
Le format d’image JPEG pour le Web
Le format d’image JPEG (avec extension .jpg) est un format développé pour la compression d’images. Il est surtout utilisé pour publier les images sur le Web. On convertit donc ses images du format TIFF au format JPEG pour fins de présentation de celles-ci sur le Web (en conservant toujours l’image au format TIFF dans ses archives). Il est à noter que cette compression dégrade l’image. Plus le taux de compression est élevé, plus il y a dégradation de l’image. De plus, à chaque sauvegarde, la dégradation s’amplifie (une nouvelle compression s’effectue à chaque sauvegarde). Il ne faut donc jamais utiliser ce format pour archiver ses images astronomiques. La conversion standard s’effectue en 24 bits, c.-à-d. 8 bits par couleur RVB (16,8 millions de teintes de couleurs différentes).
Le format PNG
Le format PNG (avec extension .png) permet d’enregistrer l’information jusqu’à 16 bits pour une image monochrome ou jusqu’à 48 bits pour une image couleur. La compression, sans perte, proposée est de 5% à 25%. Ce format peut être intéressant si on n’a pas accès au format FITS ou RAW lors de la prise de vue.
Les formats d’images propriétaires
Voici la présentation de deux formats d’images propriétaires souvent utilisés en imagerie astronomique :
Le format PSD de Photoshop
C’est un excellent format de travail pour Photoshop. Il supporte les images monochromes en 8, 16, 24 et 32 bits, la couleur RVB, CMJV (Cyan, Magenta, Jaune et Vert ou CMYG en anglais) et la couleur LAB (basée sur les couleurs perçues par l’œil humain) pour la retouche d’image photographique. Il peut contenir des informations de plusieurs couches (pour l’imagerie couleur entre autres), la gestion des calques et masques, de tracés vectoriels, etc. Plusieurs astrographes recommandent d’utiliser ce format propriétaire pour traiter les images astronomiques avec Photoshop. Vous avez donc le choix d’utiliser le format PSD ou TIFF pour le traitement de vos images astronomiques avec Photoshop. Personnellement, j’utilise le format TIFF, car lui aussi supporte les gestions des calques (layers) et masques de Photoshop.
Le format PIC d’Iris
Si vous utilisez le logiciel Iris pour prétraiter vos images RAW couleur du ciel profond provenant de votre APN, il faut utiliser le format propriétaire PIC de ce dernier. C’est le seul format d’Iris qui peut contenir les données couleur sur 48 bits (16 bits par couche RVB). Le format PIC offre aussi de meilleures performances en termes de vitesse de traitement.
Les autres formats d’images
Il existe d’autres formats d’images, mais ils sont de moindres importances pour l’imagerie du ciel profond.
Les formats d’images recommandés pour l’imagerie du ciel profond
- Pour l’acquisition des images et le prétraitement : le format FITS 16 bits monochrome (LRVB) ou FITS en mode RAW pour les caméras CCD couleurs et pour les APN le mode RAW proposé par le fabriquant
- Le format TIFF 16 bits (ou le format propriétaire PSD 16 bits de Photoshop) pour le traitement des images
- Le format JPEG 24 bits (8 bits par couleur RVB) pour la publication des images sur le Web
Richard Beauregard
Le Ciel Astro-CCD
Révisé le 2021/11/03